Sur Paris Première, une blonde et bouclée journaliste, Alexandra Golovanoff animait jadis une émission au travers de laquelle elle suivait un chef d'entreprise du matin au soir. Le connaître en l'observant, en lui posant quelques questions tombées du ciel, comme "Pourquoi ce mug à l'effigie de Benny Hill sur votre bureau ?" et j'en passe. L'humaniser, le rendre presque attachant était son dessein.
Au cinéma, Fabien Constant a choisi de faire de même en mettant du glamour et une pincée d'esthétisme dans tout ça en nous proposant un long documentaire sur Carine Roitfeld, considérée comme icône chez les modeux.
Anna Wintour, l'autre rédactrice de mode connue comme le loup blanc all over the world, fait tout le temps la gueule, Carine Roitfeld fait le contraire et le prouve.
Le film s'articule sur une étape cruciale de la vie de madame Roitfeld, moment où elle décide de quitter le magazine Vogue, pour créer son propre bébé de papier glacé. Pari risqué qui nous permet de connaître en profondeur l'univers et le parcours de cette femme attachante et accessible, qui ne tombe pas facilement dans tous les clichés glanés par ce monde de la mode parfois très perché.
L'une des premières scènes commence justement avec l'un d'entre eux. Des bloggueurs de mode attendent dans un bureau de Manhattan la venue de leur idole, qui vient leur parler boulot; la porte s'ouvre, la styliste entre, souriante et une créature barbue à peine habillée de cuir et de lanières l'accueille d'un "OH-MY-GOD" des plus artificiels. Comme si Nadine Morano voyait Nicolas Sarkozy rentrer dans sa chambre à coucher...
Toute cette exagération fait partie de cet univers, beaucoup de flatteries toujours en américain, du "Aille looove it" en veux-tu, en voilà, mais vite recouverte par la cape de complicité qui unit la caméra de Fabien Constant et l'ouverture d'esprit de Carine Roitfeld.
Elle voyage, elle plaisante, elle se raconte, évoque ses proches, le fait d'être grand-mère, évoque sa grande sensibilité, laisse ses collaborateurs parler en réunion, nous montre la mode d'une façon plus humaine qu'à l'accoutumée.
Mention spéciale pour les quelques apparitions du sémillant Lagerfeld, qui notamment, dans son gigantesque bureau noir de chez Chanel, voit un petit bambin aux cheveux longs arriver et, toutes activités cessantes, se précipite pour le prendre dans ses bras et le chouchouter en espérant sans doute qu'un peu de dandysme lui tende aussi les bras à la sortie de l'adolescence.
L'on se demande parfois si la mode et tout le joyeux bordel qui la borde servent à quelquechose, mais elle a au moins un mérite, celui de faire rêver et de rendre le quotidien un peu plus coloré de temps en temps.
Carine Roitfeld en est une ambassadrice trèèèès efficace et de surcroit, hautement sympathique.